Genève

La capitale du vin suisse

Texte: Alexandre Truffer, Photos: Michael Legentil

Les cuvées de caractère du troisième vignoble de Suisse ont conquis une place de choix dans les établissements prestigieux de Genève. Ce qui permet à la plus internationale des villes du pays de revendiquer un titre encore peu disputé, celui de capitale du vin helvétique.

En mai 1932, le député socialiste Léon Nicole déclare lors d’une séance du Grand Conseil qu’il est nécessaire de détruire le vignoble cantonal. Selon le «Journal de Genève», le futur président du Conseil d’Etat estimait «qu’il est absurde de faire de la viticulture dans le canton et que le vin genevois n’est que de la vulgaire piquette». Si rares sont les propos aussi outranciers, il est vrai que la réputation des vins nés à l’ouest du Léman a longtemps été mauvaise. «Lorsque je suis arrivé en Suisse (en 1982), nous avions quelques vins genevois à la carte, se souvient Claude Legras, mais nous évitions de les proposer. Aujourd’hui, les crus du canton représentent près de la moitié des ventes au restaurant gastronomique (2 étoiles Michelin).» La montée en gamme de la viticulture régionale est un constat partagée par les dix professionnels rencontrés pendant la rédaction de cet article. Et l’on peut difficilement parler de chauvinisme ou de protectionnisme puisque huit d’entre eux sont français et le neuvième… indien.

La révolution qualitative du vin genevois a débuté il y a trois décennies. En 1988, le canton est le premier de Suisse à adopter un règlement régissant une Appellation Origine Contrôlée. La montée en gamme ne se passe pas sans à-coups, mais petit à petit, les vins genevois parviennent à reconquérir leur principaux clients: les Genevois. Ici, la question de l’implantation en Suisse alémanique n’est venue que dans un deuxième temps. Cette stratégie a permis de regagner une place de choix dans les restaurants et les bistrots de la Rome protestante.

«En 1982, nous avions quelques vins genevois à la carte, que nous évitions de proposer. Aujourd’hui, ils représentent près de la moitié des ventes du restaurant gastronomique.»

Claude Legras, chef du Floris (2 étoiles Michelin)

Comme nous le confie un producteur vaudois rencontré lors d’une présentation de la Mémoire des Vins Suisses organisée au cœur de la rade: «à l’exception des Dézaley, les vins vaudois ont été éjectés des cartes genevoises. Et maintenant, ce sont les valaisans qui commencent à céder la place à des références locales». Ironiquement ou logiquement, c’est selon, la déferlante en faveur des crus du canton s’est arrêtée au porche des professionnels des microondes. Ainsi, par la voix de son directeur Laurent Terlinchamp qui estimait dans la Tribune de Genève qu’un tiers des 3 000 établissements du canton ne proposent aucune référence genevoise, la Société des cafetiers, restaurateurs et hôteliers de Genève s’est déclarée prête à aller jusqu’au Tribunal Fédéral pour combattre l’obligation d’inclure un cru genevois sur la carte. Une obligation, calquée sur le modèle vaudois, que le Grand Conseil entendait ajouter dans la nouvelle loi sur les cafés supposée remplacer la réglementation en vigueur datant de 1932. La cohabitation difficile entre crus étrangers et vin genevois ne date d’ailleurs pas d’hier. En 1704 déjà, un impôt protectionniste décidé par l’exécutif rencontra une forte opposition. Sous la pression des bourgeois de la ville, dont certains possèdaient des vignes dans les pays voisins (Savoie et Pays de Vaud alors sous le contrôle de Berne), la mesure sera vite abolie.

Le premier vignoble suisse

Bien que l’histoire du vignoble genevois reste encore assez méconnue, certains indices laissent penser que l’ouest du lac Léman fut une région pionnière en matière de vin. Un dossier du magazine universitaire «Allez Savoir» (octobre 2003) rappelle que si les Romains, comme les Grecs, maîtrisaient à la perfection culture de la vigne et technique de vinification, ce n’était le cas ni des Gaulois, ni des Helvètes. Ces derniers installés sur le plateau suisse restèrent d’ailleurs fidèles à la bière et à l’hydromel jusqu’à leur entrée forcée dans le giron romain. A cette époque, Genève n’est ni helvète, ni romaine, mais la capitale d’une tribu celte, les Allobroges, qui se soumirent aux glaives des légions en 121 avant Jésus-Christ. Tandis que la ville lémanique devient un poste frontière de la Gaule romanisée, l’Allobrogica, cultivé alors des Côtes-du-Rhône jusqu’au Lac Léman, trouve le chemin du Latium. Des auteurs antiques comme Pline et Columelle rapportent que ce raisin donnait naissance au «picatum», un vin reconnaissable à ses notes résineuses (qui provenaient sans doute de la poix dont on enduisait les tonneaux pour garantir leur étanchéité). Toutefois, il semble hasardeux de considérer l’Allobrogica comme un cépage, au sens acutel du terme. Selon l’ampélologue José Vouillamoz, l’hypothèse la plus plausible est que l’Allobrogica était constitué d’une population de «proto-Mondeuse» dont l’évolution au fil des siècles aurait donné naissance à la la Syrah et à Mondeuse Noire. A l’heure actuelle, celle-ci a presque disparu du territoire genevois, mais cette variété robuste et quelque peu rustique a longtemps été prépondérante.

Des historiens genevois rapportent qu’au début du 19 e siècle, «la variété la plus courante dans la région est un gros rouge appelé Savoyan, nom local de la Mondeuse». Les documents de l’époque montrent que le Chasselas – amené du canton de Vaud – côtoie l’Altesse, le Pinot Noir, le Muscat et le Gouais. Pas de trace toutefois du Gamay, qui apparaît ainsi comme un classique assez «récent». Arrivée du phylloxéra en 1887, développement du système coopératif, création des premières AOC vont chambouler le vignoble à intervalles réguliers. Aujourd’hui, les vins genevois, complexes et innovants, semblent avoir achevé leur mue. Ayant reconquis le palais de leurs concitoyens, ils peuvent désormais envisager de déployer leurs ailes pour briller toujours plus en Suisse comme à l’international.

Hôtel Beau Rivage

Complicité au Chat Botté

«Genève doit être la capitale du vin suisse, comme Paris est la capitale du vin français même si les vignobles mis en avant – Bordeaux, Bourgogne, Champagne, Languedoc – se trouvent à des centaines de kilomètres de la Ville Lumière», affirme Vincent Debergé, le chef sommelier du Beau Rivage. Ce Basque de 33 ans reconnaît qu’il connaissait peu les vins genevois avant d’arriver dans le canton : «J’avais entendu parler de grands noms du Valais et des Grisons, mais j’ai été mis dans le bain tout de suite. J’ai goûté toutes les références à la carte, puis je suis allé voir les vignerons. Il me paraît évident qu’un établissement situé au cœur d’une région viticole mette en avant la production locale». Une obligation d’autant plus aisée à remplir que, «la vinification apparaît de plus en plus précise et les vins sont toujours plus profilés». La qualité et le caractère ne suffisent pas pour s’imposer sur la carte du Chat Botté, le restaurant étoilé de l’Hôtel Beau Rivage, il faut aussi que le vin s’accorde avec la cuisine de Dominique Gauthier. Arrivé en Suisse en 1992 à l’âge de 25 ans, celui-ci a travaillé dix ans comme sous-chef du restaurant gastronomique du palace genevois avant d’en reprendre la responsabilité en 2001. Nommé cuisinier de l’année en 2009 par Gault & Millau, il revendique une cuisine méditerranéenne basée sur des produits de qualité qui évolue en fonction des saisons. Parmi ses plats signatures, on retrouve aussi bien le carpaccio de homard aux senteurs d’Asie (combawa, citronelle, lait de coco et curry apportent la touche orientale), que le lièvre à la royale (un classique de la gastronomie française travaillé en deux services) ou une tarte aux noix qui, comme l’explique ce natif de l’Isère, «était un défi, mais je suis né dans le pays de la noix et je voulais absolument proposer un dessert gastronomique avec ce fruit de mon enfance». Viognier 2012 du Domaine les Hutins, Merlot 2011 de Jean-Pierre Pellegrin ou Mélopée 2010 du Domaine des Balisiers viennent à l’esprit de Vincent Debergé lorsqu’on aborde le sujet des accords avec ces incontournables du Chat Botté. «Ces vins ont actuellement atteint leur apogée, précise-t-il. C’est essentiel dans un pays comme la Suisse où les gastronomes possèdent une culture œnologique très importante.»

Le Chat Botté
Hôtel Beau Rivage
Quai du Mont-Blanc 13
CH-1201 Genève
www.beau-rivage.ch

1 étoile Michelin
18/20 points Gault & Millau
Chef de cuisine: Dominique Gauthier
Sommelier: Vincent Debergé

 

Les vins genevois de prestige proposés par Vincent Debergé

Domaine les Hutins, Dardagny
Viognier 2012
Ce vin généreux, ample et puissant offre une belle robe doré aux reflets brillants. Le nez expressif offre les arômes traditionnels du Viognier. Abricot, pêche et fruits jaunes côtoient une délicate pointe de miel. En bouche l’aromatique exubérante similaire à celle du nez est portée par une trame rectiligne. On termine par une belle finale riche et persistante.
www.domaineleshutins.ch


Domaine Grand’Cour, Satigny
Merlot 2011
Renommé pour la précision de ses vinifications, Jean-Pierre Pellegrin livre ici un vin abouti et structuré. Robe sombre, nez expressif mariant fruits noirs et délicates notes épicées, attaque franche, tanins fermes qui commencent à se fondre dans une matière croquante, finale ample et persistante composent un vin racé. On salive d’avance à l’idée de le servir en accompagnement d’un lièvre à la royale!


Domaine des Balisiers, Satigny
Mélopée 2010
La robe, délicatement dorée, ainsi que le nez expressif où papillonnent les fruits jaunes et le miel offrent une belle première impression. Ce Chenin Blanc issu de vendanges surmaturées offre un remarquable équilibre entre sucrosité et fraîcheur. Doux, mais sans sucrosité trop conséquente, frais, mais sans acidité marquée, il est conseillé avec le dessert aux noix de Dominique Gauthier, un plat réputé pour son harmonie entre croquant et moelleux.
www.balisiers.ch

Domaine de Châteauvieux

Dans le fief de Philippe Chevrier

Lorsque les mots «cuisine», «vin» et «Genève» apparaissent dans la même phrase, il y a fort à parier que le nom de Philippe Chevrier suive très vite dans la conversation. Formé notamment par Frédy Girardet, celui-ci s’est installé au Domaine de Châteauvieux à l’âge de 27 ans. «C’était une auberge de campagne, mais aussi un bâtiment exceptionnel doté d’un caractère et d’un cachet hors du commun. J’ai senti qu’il y avait le potentiel pour créer un restaurant gastronomique. De toute façon, à l’époque nous étions loin de la ville et il fallait proposer une cuisine différente pour attirer les gens aussi loin», précise ce Genevois âgé aujourd’hui de 54 ans. Première étoile Michelin en 1991, deuxième en 1994, adoubé 19 sur 20 points au Gault & Millau (la note maximale) en 2002 et déclaré Chef de l’Année, Philippe Chevrier fait partie de ces cuisiniers entrepreneurs qui multiplient les collaborations et les établissements. En 2006, il lance une gamme de vins éponyme avec la Cave de Genève et le vigneron Nicolas Bonnet. «Nicolas Bonnet a toujours fait les vins que j’aime, explique le chef. Mais il était souvent en rupture de stock, car une majorité de sa vendange est vendue à la coopérative. Comme il ne voulait pas augmenter sa production, nous avons mis sur pied le concept des Vins de Philippe Chevrier. Nicolas a sélectionné les meilleures parcelles que vinifie Florian Barthassat, l’œnologue de la Cave de Genève.» La cave de Châteauvieux est l’une des mieux achalandées du canton. Outre les vins signés du chef et les cuvées de Nicolas Bonnet, des petits vignerons des environs comme Christian Guyot ou Marc Ramu côtoient les Petrus et autres Latour. «Près de 1 200 références», précise Christophe Montaud, le chef sommelier de l’établissement. L’Hôtel de Ville de Crissier, le Ritz à Paris, la Californie, le Valais: autant d’étapes qui ont forgé l’expérience de ce passionné né en Touraine. «Il y a trente ans la réputation des vins genevois, et suisses, n’était pas bonne. Il y a eu une magnifique transformation, mais il faut du temps pour changer l’image d’un vin, car ce vous savez influence ce que vous ressentez! Aujourd’hui, la moitié des vins servis à Châteauvieux sont genevois, ce qui montre que notre travail d’information porte ses fruits.»

Domaine de Châteauvieux
Chemin de Châteauvieux, 16
Peney-Dessus
CH-1242 Satigny
www.chateauvieux.ch

2 étoiles Michelin
19/20 points Gault & Millau
Chef de cuisine: Philippe Chevrier
Sommelier: Christophe Montaud

 

Les vins genevois de prestige proposés par Christophe Montaud

Clos des Pins, Dardagny
Syrah Grand Jules 2010
Cette sélection de Syrah de Marc Ramu, le discret et talentueux vigneron du Clos des Pins, est vinifiée en quantité limitée. Magnifique alliance de puissance d’élégance, ce rouge dense est en train d’atteindre son apogée. Des épices, du fruit mûr et de la complexité au nez, beaucoup de finesse, une matière soyeuse et de la persistance en bouche composent une Syrah aussi rare que réussie.


Christian Guyot, Bernex
Gamaret 2012
Encore une production confidentielle d’un vigneron talentueux. Le travail méticuleux à la vigne comme en cave a donné naissance à un rouge sombre, au nez exubérant de fruits noirs et d’épices, qui se distingue par sa profondeur et son amplitude. Du fruit, des épices et encore du fruit, voilà la devise de cette magnifique déclinaison du plus «international» des cépages créés par André Jacquinet à Changins.
www.vins-guyot.ch


Domaine de la Comtesse Eldegarde, Satigny
Amplitude 2012
Cet assemblage de type «bordelais » marie les trois grands cépages de la Gironde: le Cabernet Sauvignon, le Cabernet Franc et le Merlot. Le nez complexe demande un peu d’aération avant de dévoiler des arômes de pruneau, de cassis, de cerise, de girofle, de cardamome ainsi qu’une pointe de cuir. En bouche, on apprécie la matière racée, le volume remarquable et la finale aussi persistante que complexe.

Le Floris

Passionnément goûteux

A24 ans, Florent Wende est le nouveau chef sommelier du Floris, l’autre double étoilé Michelin de Genève. Arrivé il y cinq mois en Suisse après une expérience en Australie, le jeune homme admet que la viticulture helvétique n’a pas été beaucoup abordée lors de sa formation. Pourtant, en quelques mois, ce professionnel s’est adapté. Il maîtrise désormais le vignoble local. Un mot qui, chez Claude Legras signifie d’abord Anières. Cette petite commune de 2 500 habitants à quelques kilomètres de la frontière française abrite le Floris et les vignes de quatre producteurs: le Domaine des Ménades, Philippe Villard du Domaine Villard & Fils, son frère Laurent du Domaine Les Parcelles et le Domaine de la Côte d’Or. Tous bénéficient d’un relais efficace auprès d’une clientèle haut de gamme. «Lorsqu’un village vous accueille, il faut s’intégrer à la vie locale», explique Claude Legras, qui met un point d’honneur à proposer des vignerons qu’il connaît et apprécie. «Pour faire une cuisine haut de gamme, il faut un produit de qualité et de la technique, car le client demande une certaine complexité, mais il faut surtout avoir envie de faire plaisir. Un cuisinier doit être amoureux», poursuit celui qui a commencé sa carrière genevoise en menant des tables renommées comme le Lion d’Or et le Parc des Eaux-Vives à la conquête des étoiles Michelin. Sacré Meilleur Ouvrier de France en 1991, Claude Legras rachète un restaurant en faillite en 1997, le baptise Le Floris en hommage à ses deux enfants Floriane et Loris, reçoit une première étoile et 16 points Gault & Millau l’année de l’inauguration. Il gagne la deuxième quatorze ans plus tard. Outre les vignerons du village, le restaurant propose une vingtaine de cuvées genevoises et autant de crus helvétiques, ce qui représente un cinquième de la carte de vins, mais plus de la moitié des ventes. «Les clients du Floris voyagent beaucoup. Ce sont des gens qui ont l’habitude des bonnes tables, explique Florent Wende. Les Genevois commencent souvent le repas avec un blanc de la région puis continuent avec un rouge d’un autre pays. Les visiteurs étrangers – qui ont souvent entendu parler des vins suisses sans pour autant en avoir goûté – se laissent aisément convaincre d’accompagner tout le menu avec des spécialités du canton.»

Le Floris
Route d’Hermance 287
CH-1247 Hermance
www.lefloris.com

2 étoiles Michelin
17/20 points Gault & Millau
Chef de cuisine: Claude Legras
Sommelier: Florent Wende

 

Les vins genevois de prestige proposés par Florent Wende

Chardonnay 2013
La Côte d’Or, Hermance
Voici un vin sapide, plaisant, fringuant qui peut s’apprécier en apéritif comme sur un plat de poisson. La robe jaune claire offre une belle brillance. Le nez expressif mêle des fruits blancs, comme la pomme et la poire, de la pierre à fusil, une pointe épicée. La bouche, fraîche et fruitée en attaque, gagne en ampleur au fur et à mesure qu’on s’approche de la finale, ample et délicatement épicée.
www.lacotedor.ch


Domaine Villard & Fils, Anières
Savagnin Blanc 2012
Philippe Villard réussit avec ce Savagnin Blanc, cépage qu’on connaît sous les dénominations Païen ou Heida en Valais, des merveilles à chaque millésime. A l’heure actuelle, le nez de ce 2012 semble un peu en retrait bien que les notes exotiques soient bien perceptibles. La bouche, par contre, offre équilibre, tension, amplitude et beaucoup de complexité. Une très belle spécialité blanche nantie d’un potentiel de garde de plusieurs années.


Domaine du Paradis, Satigny
Zinfandel 2009
Cépage tendance en Californie, le Zinfandel a besoin d’un maximum de soleil pour donner des vins puissants, corsés et chaleureux. Le millésime 2009, vinifié par Roger Burgdorfer et Didier Cornut, a bénéficié de conditions idéales ce qui confère concentration, maturité et puissance à cette cuvée vinifiée en partie sous bois. Un rouge chatoyant et généreux arrivé à son apogée.
www.domaine-du-paradis.ch

Hôtel Mandarin Oriental

Allier les vins et les épices

«Tandoori de saumon fumé, dorade à la tomate séchée et aux olives en feuille de bananier, raita au concombre à l’aneth» en entrée. «Tandoori de porc en mijoté, risotto d’épeautre, sauce Vindaloo, potée d’oignon rouge caramélisé, chutney d’ananas» en plat principal. Pour le dessert, «Cheese-cake au safran-Gulab jamun kulfi aux mûres». Bienvenue dans le monde de la cuisine indienne contemporaine. Signée par le chef Vineet Bathia, la carte du Rasoi by Vineet au Mandarin Oriental est estampillée une étoile Michelin, seul restaurant «exotique » de Genève à avoir cet honneur. Préparées par l’équipe du chef de cuisine Prashant Chipkar – un ancien du Gaggan de Bangkok, souvent considéré comme le meilleur restaurant indien au monde – les spécialités épicées du Rasoi ont trouvé en Fabien Mene un ambassadeur capable de les sublimer par des crus élégants. Chef sommelier depuis août 2013 au Mandarin Oriental, ce Français de 28 ans a fait ses classes à Paris, puis à New York, à Genève enfin. «J’ai travaillé dans des restaurants qui proposaient une cuisine française traditionnelle. En arrivant au Rasoi, il a fallu faire connaissance avec les vins suisses et repenser ma manière de voir les accords mets et vins. Dans la cuisine européenne, le vin s’accorde en premier lieu avec l’ingrédient principal: poisson, viande, crustacé, fruit. Il faut ensuite affiner la sélection en fonction des garnitures, des sauces et de l’assaisonnement. A l’inverse, la cuisine indienne se définit par ses épices et l’accord se fait avec celle qui domine. Le vin doit équilibrer la force du plat, on va donc privilégier une cuvée plutôt aromatique qui possède du gras et de la longueur. Mais il faut aussi que le vin désaltère, ce qui me pousse à chercher des crus souples, frais et légers en alcool.» Sauvignon, Chardonnay, Aligoté, Gamay et Gamaret figurent en bonne place sur la carte. «Beaucoup de clients imaginent que l’on ne peut boire que de la bière ou du thé avec la cuisine indienne. Une fois qu’ils voient notre carte, ils sont souvent un peu perdus et dans la très grande majorité des cas suivent mes conseils. Ce qui me permet de proposer les vins typés, porteurs d’une véritable identité, que les vignerons genevois maîtrisent de mieux en mieux.»

Le Rasoi
Hôtel Mandarin Oriental
Quai Turrettini 1
CH-1201 Genève
www.mandarinoriental.fr/geneva

1 étoile Michelin
16/20 points Gault Millau
Chef de cuisine: Prashant Chipkar
Sommelier: Fabien Mene

 

Les vins genevois de prestige proposés par Fabien Mene

Mermoud Vignerons, Lully
Aligoté 2012
Cépage vif et tranchant venu de la Bourgogne, l’Aligoté possède une acidité rafraîchissante qui lui permet d’accompagner à merveille poisson et crustacés. Vinifié avec peu de soufre et sur un côté un rien oxydatif, ce blanc racé et sec à la robe délicatement paillée présente un profil tendu porté par une fraîcheur délicatement citronnée. Vif et sapide, il off re un nez complexe où les fruits blancs, le thé vert et les herbes aromatiques se mêlent avec harmonie.
www.mermoud-vignerons.ch

 

Domaine Les Balisiers, Satigny
Chardonnay 2011
Elevé en amphores, ce Chardonnay à la robe brillante se distingue par son ampleur et sa longueur, ainsi que par ses accents minéraux perceptibles au nez comme en bouche. Les fruits blancs, la poire surtout, et quelques agrumes complètent l’aromatique de ce blanc épanoui qui présente un remarquable volume ainsi qu’une finale complexe et persistante, elle aussi minérale.
www.balisiers.ch

 

Domaine Dugerdil, Dardagny
Gamay 2013
Plaisant et fruité, voici deux qualités que l’on peut associer à ce Gamay. Pourtant, derrière la robe violine étincelante, les notes de baies des bois expressive et la souplesse des tanins, se niche une cuvée racée qui possède de la structure et fait preuve de complexité. Un vin sapide et accessible qui possède une personnalité bien marquée.
www.domaine-dugerdil.ch

Hôtel Président Wilson

Le jumelage de la France et du Japon

Meilleur Ouvrier de France, vainqueur du Prix Taittinger, du Bocuse d’Or, du prix Auguste Escoffier, chef pendant plus de dix ans de l’Espadon, le restaurant doublement étoilé du Ritz sur la Place Vendôme à Paris: Michel Roth est, à 55 ans, l’un des chefs français les plus renommés. La trentaine à peine, Geoffrey Bentrari possède lui aussi un CV bien fourni: sommelier de l’année 2010, vainqueur du concours du Meilleur Sommelier de Montagne en 2013, cité dans le classement des 50 qui font le vin suisse du magazine Bilan, chef sommelier du Restaurant de Courten de 2005 à 2013. Le duo collabore depuis deux ans au Président Wilson. Avec un succès certain, puisque le Bayview, le restaurant gastronomique du palace, s’est vu attribuer une étoile Michelin en 2014. Une réussite qui laisse augurer le meilleur pour Umami by Michel Roth, le nouveau concept japonisant de l’établissement. Cette terrasse, ouverte sur le lac en été, couverte en hiver, propose une cuisine de jumelage entre France et Japon. «Pour une cuisine de qualité, il faut une connaissance des produits, de la technique, une envie de faire plaisir, une personnalité et une régularité. Avec le temps, on affine sa griffe. En ce qui me concerne, je pars toujours d’une base existante, à laquelle j’essaie de donner de la finesse et de la subtilité. Il faut que les clients se régalent. Je connais bien la gastronomie japonaise, découverte lors de nombreux voyages, qui possède ce raffinement, cette fraîcheur, ce côté épuré, déclare Michel Roth. » Rappelant que le canton possède quatre kilomètres de frontière avec la Suisse et plus de cent avec la France, Geoffrey Bentrari constate que «Genève abrite un vignoble qui correspond bien à son statut de ville internationale. Les cépages qui s’y développent le mieux sont des variétés mondialisées comme le Sauvignon ou le Merlot. La plupart des clients du restaurant sont des étrangers qui n’ont jamais bu de vin suisse. Il faut éviter qu’ils se sentent trop perdus. En prenant un Chardonnay de Dardagny ou un Cabernet de Peissy, ils ont un repère grâce au cépage mais découvrent aussi un style, une spécificité genevoise. » Fréquentant une clientèle aux goûts très hétérogènes, ce professionnel confi e que le choix des vins dépend plus de l’ambiance que du choix des plats: «Les Genevois qui viennent en famille cherchent plutôt à découvrir des cépages ou des régions qu’il ne connaissent pas. Les mêmes, accompagnés de clients ou d’amis étrangers, commandent local pour faire découvrir «leur» vignoble.»

Umami by Michel Roth
Hôtel Président Wilson
Quai Wilson 47
CH-1201 Genève
www.hotelpresidentwilson.com

Chef de cuisine: Frank Meyer
Sommelier: Geoffrey Bentrari

Les vins genevois de prestige proposés par Geoffrey Bentrari

Domaine de la République et Canton de Genève, Bernex
Blanc Noir Brut
Ce Pinot Noir pur élevé en méthode traditionnelle se cache dans une bouteille élégante et sobre. La robe délicate et le nez, qui révèle des arômes délicats de fruits rouges, de mie de pain et de thé vert, précèdent un bouche équilibrée et fraîche où des arômes un peu plus fruités qu’au nez sont portés par une eff ervescence bien maîtrisée. Belle finale fraîche et fruitée.


Domaine Les Faunes, Dardagny
Scheurebe 2013
Le Scheurebe fait partie des classiques de Frédéric et Ludovic Mistral, les deux frères qui président aux destinées du Domaine des Faunes. La fraîcheur du millésime  2013 à bénéficie à cette variété aromatique qui présente ici un nez expressif où se succèdent l’ananas, le litchi, le fruit de la passion et le pamplemousse. En bouche, les notes de maracuja et d’agrumes sont portées par une trame tendue qui se prolonge dans une finale rectiligne.
www.les-faunes.ch

 

Christian Guyot, Bernex
Trois Helvètes 2012
Diolinoir, Garanoir et Gallota s’allient ici pour donner naissance à une cuvée fruitée et soyeuse qui charme par ses notes expressives de fruits noirs. Durant la vinification, l’oenologue cherche à privilégier le fruit, le croquant et la sapidité plus que la concentration ou la puissance. Résultat réussi avec un rouge élégant sans jamais devenir facile qui sait respecter le raffinement de la cuisine japonaise.
www.vins-guyot.ch

 

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